7 Novembre 2019
Avec Le Mobilier de Cabane, je poursuis mes portraits de créateurs passionnés qui nous invitent dans leurs univers singuliers. Après Lydia Rump et Paul Bijaoui de Plakat, c'est aujourd'hui Alain Brat qui s'est prêté au jeu de l'interview pour nous faire découvrir son travail du bois inspiré de l'ébénisterie traditionnelle du Canada. S'il reprend les codes de cet artisanat populaire du 19ème, il y apporte aussi sa touche personnelle entre douce impertinence et retour à l'essentiel.
Contact pour vos projets :
Alain BRAT
Hôtel de Clérieu, 2 rue des Trois Carreaux,
26100 Romans-sur-Isère
Tél : 06 14 71 50 88
Mail : alainbrat@gmail.com
Pouvez-vous nous présenter votre marque Le mobilier de cabane en quelques mots ?
Le Mobilier de cabane est un atelier de travail du bois, fabrication de mobilier simple et rustique, objets de cuisine, installé depuis trois ans à l’Hôtel de Clérieu, à Romans-sur-Isère. Certaines phases de la fabrication sont réalisées au sein d’un atelier partagé situé à Saint-Hilaire-du-Rosier, au milieu des champs de noyers. S’y trouvent des machines anciennes et fiables, et une communauté de professionnels et de passionnés. La Vallée de l’Isère fournit le bois nécessaire aux réalisations : noyer, châtaignier, frêne, hêtre, chêne.
Le mobilier de cabane est une toute jeune marque. Pouvez-vous nous raconter son histoire, l’histoire de sa création ?
L’Histoire de la marque « Le mobilier de cabane » commence aux Etats-Unis, en Floride, puis en Californie, à l’occasion d’une série de voyages. Il y a là-bas du mobilier traditionnel issu de la région des Adirondack, des librairies, une documentation fournie, et des amis prompts à s’enthousiasmer de me voir projeter une fabrication en France. Je suis revenu dans ma région, fort de ces encouragements, et aucune idée de ce qui m’attendait, ni de la façon de s’y prendre, avec un désir, c’est tout. Le rêve américain ! ☺
Vous créez et fabriquez vous-même toutes les pièces, meubles et accessoires ? Quelles sont vos sources d’inspiration ?
L’inspiration naît au croisement de la tradition dans laquelle je m’inscris et des discussions fournies avec les futurs clients dans le cadre de projets précis. La contrainte est source de créativité.
Aujourd’hui, de plus en plus, nous avons besoin que la décoration ait du sens. Quelles sont les valeurs qui sont importantes dans votre projet ? Quels sont les messages que vous souhaitez faire passer ?
L’histoire du mobilier Adirondack commence au dix-neuvième siècle, lorsque les américains des grandes villes s’échappent durant l’été vers les grands espaces de la région des grands lacs. Ils y campent, chassent et pêchent. Une demande de meubles pour ces campements explose alors. Un nouveau style introduit le sentiment et les matériaux des étendues sauvages dans l’espace domestique. Les guides touristiques, menuisiers, forestiers, occupent leur temps libre des longs hivers à fabriquer des tables, chaises, lits, buffets… Les constructions sont simples, les formes rustiques, le bois est celui à disposition dans les forêts environnantes. Le mobilier est fait de branches non écorcées, les plateaux de table, les façades sont parfois décorés de mosaïques de brindilles. Le mode de fabrication s’inscrit dans une démarche d’utilisation frugale des ressources, de valorisation de ce que la nature produit d’asymétrique, de poétique et d’une production qui prends son temps.
Le message que je veux transmettre est celui-ci, une histoire, une tradition. J’en suis le messager.
Les meubles qui sortent de l’atelier, sous leur forme toujours simple et leur fonctionnement pratique ont valeur d’objets manifestes. De bons sauvages que les urbains que nous sommes vont domestiquer en leur donnant une place dans leur intérieur bien civilisé.
Quel est votre plus grande satisfaction depuis le démarrage de la marque ?
Des regards amusés, interrogateurs, surpris, ravis, des personnes qui sont en contact avec les meubles et objets de l’atelier, qu’ils soient passants lors d’une exposition, visiteurs ou clients.
L’entreprise peut donner un peu plus au monde que la fourniture d’un bien/service contre de l’argent.
Même si j’ai besoin d’argent pour poursuivre mon activité, évidemment, je m’efforce de le voir toujours comme une conséquence, pas une fin en soi.
Où peut-on trouver vos collections ?
L’année dernière, c’était à la boutique La Traverse, à Saoû. Cette année, c’était à l’Appart Boutique à Romans sur Isère et à la galerie Epsilon & Co à l’Isle sur la Sorgue. Des projets pour la suite de l’histoire… et une fin d’année au marché du samedi matin à Villeneuve-les-Avignon. Une pratique de commercialisation nomade, que j’apprécie. Et toujours sur place à l’atelier pour voir, acheter ou bosser autour d’envies précises. Pour la boutique online, je suis présent sur le site L'Atelier des Créateurs.
Avez-vous une actualité à court ou moyen terme ? Quels sont vos projets pour la suite ? De nouveaux meubles, d’autres matières, des collaborations…
Je ne me projette pas trop, je fais confiance à ma bonne étoile, aux collaborateurs, amis de l’atelier, aux rencontres imprévues pour poursuivre ma route. En même temps, plusieurs dates posées en 2020 pour des expositions vente, du côté du sud….
Un bon stock de bois d’okoumé (bois rouge africain) est rentré il y a un mois. Je n’avais pas prévu de travailler ce type de bois, mais une belle opportunité. Sec depuis 35 ans. Je vais le transformer en chaises ! A vos projets ☺
J’ai encore en réserve des planches à découper bien épaisses, en frêne ou chêne, avec de gros liens de cuir pour suspendre dans la cuisine. De beaux cadeaux pour Noël !
Prévu aussi en 2020 de développer ma capacité à expédier des meubles hors de la France. J’ai déjà eu des demandes. J’ai pris contact avec un transporteur local qui sait faire très bien. Pour les îles, c’est parfois une aventure, et ça prend son temps, c’est tout.
Quelle est la pièce de votre maison que vous préférez ? Et pourquoi ?
Dans ma maison, il n’y a pas vraiment de logique de pièces, plutôt de coins. Et mon coin préféré, c’est celui où il y a mon bureau, des bouquins, une table-plateau et un gros fauteuil en cuir marron que mes amis ont appelé le fauteuil de pacha. Ultra confortable. Mon poste d’observation sur le monde. J’y discute, mange, lis, bois, pense, téléphone, dort, crème pour les mains, les pieds, bref, je n’ai rien inventé, que mon coin à moi.
Avez-vous un tabou déco ?
Pas à ma connaissance. Il m’est arrivé de voir chez d’autres des objets ou des meubles que je ne voudrais pas dans mon intérieur, mais qui ont une telle charge poétique, du fait de leur laideur, et du lien privilégié qu’ils entretiennent avec leur propriétaire que je les trouve vraiment touchants de naïveté, de gentillesse. Ce sont des madeleines de Proust. Donc chacun la sienne.
Je pense en ce moment à la fausse buche lumineuse qui se trouvait dans la cheminée chez l’oncle de mon père, parce que le bois qui brûle dégage beaucoup de poussière.
Ou ce pouf ancien en bois et velours, complètement flingué, qui se trouve chez nous, et que nous gardons, parce que Albertine, la chatte de la maison y a fait son nid d’automne.
Ou à la mode d’Alessandro Michele, d’une sincérité sans compromis.
Elle est excellente, Gaëlle, votre question.
Un meuble, un luminaire ou un accessoire déco (de designer ou pas) qui vous fait rêver ?
Les chaises Barell et la dining table de Franck Lloyd Wright. Quand j’étais gosse j’allais les regarder dans la vitrine de Collectania, sous les arcades du Louvre. Pas pour rien dans mon affaire d’aujourd’hui.
Quels sont, selon vous, les tendances déco pour la saison à venir ?
A mon avis, le mobilier et les objets à partir de morceaux divers ramassés consciemment dans une forêt, du végétal ajouté à du bois d’ouvrage.
Un projet consiste en une proposition à un groupe (des « bodgers » mot en anglais) qui travaillerait sur deux ou trois jours, d’abord à aller glaner en forêt, puis à l’atelier pour fabriquer d’abord une chaise, meuble à la portée universelle en Europe, qui prendrait pour chacun un sens personnel du fait des matériaux choisis, des techniques d’assemblage, de l’histoire d’avant et à l’instant et au lieu où on a glané.
Un meuble, un luminaire ou un accessoire déco (de designer ou pas) qui vous fait rêver ?
Les chaises Barell et la dining table de Franck Lloyd Wright. Quand j’étais gosse j’allais les regarder dans la vitrine de Collectania, sous les arcades du Louvre. Pas pour rien dans mon affaire d’aujourd’hui.
Quels sont, selon vous, les tendances déco pour la saison à venir ?
A mon avis, le mobilier et les objets à partir de morceaux divers ramassés consciemment dans une forêt, du végétal ajouté à du bois d’ouvrage.
Un projet consiste en une proposition à un groupe (des « bodgers » mot en anglais) qui travaillerait sur deux ou trois jours, d’abord à aller glaner en forêt, puis à l’atelier pour fabriquer d’abord une chaise, meuble à la portée universelle en Europe, qui prendrait pour chacun un sens personnel du fait des matériaux choisis, des techniques d’assemblage, de l’histoire d’avant et à l’instant et au lieu où on a glané.